Dionysos
Formé en 1993 par quatre
copains de lycée, Dionysos s'est taillé une jolie réputation
de trublion pop au sein du petit monde indé français.
Après avoir écumé les scènes de France
(notamment en première partie de Louise Attaque), mais aussi
en Suisse, le groupe de Valence vient de franchir une étape
en signant avec une major et en s'offrant, pour son troisième
disque, les services de Norman Kerner et Dan Presley, producteurs
de Spain et Faith No More, entre autres.
Les Dionysos ressemblent à leur
musique : une bande de lutins malicieux qui cultivent le décalage
avec un art consommé. Si on leur parle de l'aspect atypique
de leurs textes, volontiers surréalistes, toujours sur la corde
raide, en équilibre précaire mais qu'une seule phrase
suffit pourtant à faire tenir debout, Mathias Malzieu (chant)
répond, le sourire aux lèvres : " Nous ne revendiquons
absolument pas le côté surréaliste ; d'ailleurs,
après tous les maîtres du genre, comment le pourrions-nous
? Rien n'est calculé quand j'écris. Je privilégie
la spontanéité. Souvent, je trouve une ligne de guitare
et chante ce qui me passe par la tête. Ensuite, je garde les
mots ou les phrases qui collent et j'improvise un texte ".
Et si leurs pop-songs mâtinées de folk se parent souvent
de guitares saturées et de voix distordues, elles restent dénuées
de toute agressivité : " C'est vrai, les textes ne
sont jamais agressifs au sens littéral du terme. Je préfère
jouer la carte de l'imaginaire, susciter des émotions. Même
si certaines phrases comme celles de " Pyjama " sont assez
violentes. Je n'aime pas l'évidence ; je préfère
le côté un peu tordu avec un sourire en coin et quelque
chose de plus grave en filigrane ". En sept années
d'existence, le groupe n'a connu qu'un seul changement de personnel
: l'arrivée dans ses rangs de la violoniste Elisabeth Ferrer.
" C'est un hasard. Nous avions le morceau " Arthur "
sur lequel nous voulions du violon. Nous avons demandé à
une copine de venir jouer et ça nous a tellement plu que nous
en avons enregistré quatre autres. Puis, elle est tombée
enceinte, nous avons rencontré Babette et ça a tout
de suite collé entre nous. " Deux ans et quelques
deux cents concerts plus tard, Dionysos finit par atterrir chez Tréma,
la maison de disques de Louise Attaque. Sa signature dans une infrastructure
imposante n'altère en rien le comportement du groupe. D'après
Mathias, le seul changement notable est l'augmentation conséquente
des moyens mis à leur disposition. " Il ne nous ont
imposé aucune barrière artistique. De toute façon,
nous étions arrivés à une échéance.
Si nous voulions aller de l'avant, nous ne pouvions pas faire l'album
comme les précédents, en six jours, mixage compris.
Ils nous ont donné un bon outil pour aller plus loin dans nos
envie. Cela nous a permis d'essayer une section de cordes, d'approfondir
notre penchant acoustique ; nous souhaitions qu'à l'écoute,
tu aies l'impression que le groupe est à côté
de toi ". Les Dionysos gardent un grand souvenir des semaines
passées à San Francisco dans le studio où travaillèrent
notamment des gens comme Kurt Cobain. " Au début, nous
avions l'attitude fan, mais très vite tout le monde s'est mis
à notre niveau et dès le lendemain nous nous sommes
attelés à la tâche. Ils étaient très
attentifs à nos désirs. Ils savaient comment s'y prendre
pour les concrétiser. Quand nous avons suggéré
d'essayer des cordes, ils nous ont déniché une section
formidable. Nous n' avions pas besoin de partitions. Il suffisait
qu'on leur chante ce que nous voulions et hop !, comme par magie,
ils le jouaient. C'était génial, ils nous ont fait gagné
un temps fou. " Quoi qu'il en soit Dionysos, qui cite Nirvana,
PJ Harvey, Björk, mais aussi Tom Waits comme influences, est
un groupe bien ancré dans son époque. Il est sur la
route cet automne, et c'est une excellente occasion pour ceux qui
ne le connaissent pas de se frotter à son univers malin et
joyeusement décalé.
Par Laurent Ducastel
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