Les français Dionysos ne sont plus à un paradoxe près. En effet, un amour immodéré pour la culture américaine dans le pays des quotas et de l'exception culturelle a fait de ce quintet illuminé un mutant hybride des plus réjouissants. Chez ces Valençois, les textes ont la curieuse habitude de commencer dans la langue de Shakespeare pour se terminer dans celle de Rousseau et les références pop les plus triviales (Star Wars, skate, McEnroe…) se mêlent dans un canevas surréaliste et poétique particulièrement intrigant.

Ces Gaulois sont-ils fous ? En quatre albums de rock foutraque - dont deux autoproduits, Happening Song et The Sun is Blue like the eggs in winter, suivis de Haiku et du nouveau Western sous la neige – Dionysos a mis bas un bon petit paquet de ritournelles acides qui sont autant de plaidoyers pour un rejet de l'âge adulte.
En gamins attardés, ils composent des chansons sans queue ni tête, à base de folk, de pop et de rock azimuté, qui doivent autant aux Pixies qu'aux Little Rabbits.

Si Mathias Malzieu, tête de proue de Dionysos, à raté son école de cinéma, c'est pour mieux en faire profiter ses chansons fragiles en les peuplant d'adorables monstres que n'aurait pas renié Tim Burton. Au fil des quatorze titres de Western sous la neige, l'auditeur fait ainsi connaissance avec la poitrine disparue de Liquid Princess, la dyslexie poétique de Don Diego 2000 ou les ciseaux sauvages de la coiffeuse d'oiseaux, le tout mis en forme par un orchestre endiablé, d'une efficacité redoutable.

A l'instar de leurs camarades de Sloy, c'est logiquement aux Etats-Unis que les chansons difformes de Dionysos sont allées chercher un sorcier, en la personne de Steve Albini, seul capable de les comprendre et de les retranscrire intelligemment sur le format d'un album.
Si ce dernier est connu pour avoir donner des ailes à quelques maquisards du rock international (des Pixies, justement, à Low en passant par Guided By Voices et Palace), il est surtout reconnu pour laisser l'essence même des groupes s'exprimer.

Et l'essence même de Dionysos se trouve sur scène, où Mathias, Elizabeth, Michael et les autres retrouvent les joies infantiles du bac à sable, lorsque la maîtresse a le dos tourné : on crie, on crache, on court et n'importe quelle monticule est prétexte à une escalade téméraire ou à un saut inconscient.

En attendant de les voir sur scène, lesinrocks.com vous propose de voir le clip de Song for Jedi, sucrerie régressive bourrée de clins d’œil hilarants aux héros de notre enfance.

Martin Cazenave