Télérama - n°2820 - Janvier 2004



Chanteurs canons

Dionysos est un groupe sacrément vivant. Bon vivant, même. A l'image du dieu qu'il s'est choisi pour emblème, patron du sexe et de l'ivresse, le sextet de Valence est une sorte d'hérésie marginale dans le pieux paysage du rock français.
Une incongruité joyeuse et épicurienne qui mélange avec un enthousiasme de cancres incontrôlables tous les plaisirs, les effluves, les secousses d'une musique piochée dans les râteliers, et les meilleurs. Les Dionysos possèdent la pêche festive de la Mano Negra, la folie loufoque de Gong, le lyrisme rageur de Noir Désir et le déstructuralisme électrique des Pixies. Dadaïstes et enfantins, ils raffolent des comptines absurdes, des contes de traviole, des refrains cinoques et des arrangements soniques, style Jarry revisité par Beck, ou Prévert célébrant Bacchus. Vivant, donc live : les concerts du groupe ressemblent à de torrides bacchanales, menées par une sorte de lutin bondissant, Mathias le chanteur, et une violoniste divine, Babet. Cette triple sortie (2 CD, 1 DVD) représente donc le témoignage intégral des exploits scéniques de nos feux follets. Un disque électrique, où le Thank you Satan de Ferré côtoie le I put a spell on you de Screamin' Jay Hawkins et les tubes foldingues de la bande, de Coccinelle à Song for Jedi, en passant par un hommage à John McEnroe. Sur le disque acoustique, on notera, entre autres surprises, la chanson générique de Spiderman, flirtant avec le My rifle, my pony and me, du Dean Martin de Rio Bravo. Le DVD du concert, enregistré à La Laiterie de Strasbourg, et agrémenté de clips et de petits films barjots, est le pendant visuel indispensable à l'univers de ce groupe bien singulier. Tonique, divin et diabolique, donc dionysiaque…

Philippe Barbot